Après la conférence de Yalta

Forces nouvelles 17/2/1945

 

La conférence des Trois, qu'on peut appeler enfin de son nom : « conférence de Crimée » ou « conférence de Yalta », s'est déroulée dans le plus grand mystère. Le communiqué officiel qui l'a suivi n'en a que plus d'intérêt. Nous avons enfin l'écho de ce qu'ont décidé les trois hommes qui mènent actuellement le destin du monde.

Sans doute est-il trop tard, déjà, pour parler de l'absence de la France. Nous ne voudrions pas avoir l'air de ressasser un grief. Au surplus, elle n'aura peut-être eu que des inconvénients pour notre pays. Ces séries de réunions où quelques hommes d’État élaborent dans le plus grand secret, le destin des peuples, inquiètent les petits et les moyens États. Or, nous ne pouvons pas oublier notre position très spéciale vis-à-vis de ces États, ni la place qu'ils doivent tenir dans notre politique. Le général de Gaulle ne l'a-t-il pas implicitement reconnu, lorsqu'il a évoqué la Pologne, la Tchécoslovaquie, l'Autriche et les Balkans dans son discours ? Sans doute, pendant l'entre-deux guerres, avons-nous commis l'erreur de compter trop exclusivement sur ces États et de ne pas chercher un contrepoids plus solide à l'Est. Mais il ne faudrait pas tomber dans l'erreur inverse.

La question traitée à Yalta, qui nous touche le plus est celle de l'Allemagne. Les Alliés ont, une fois de plus, affirmé qu'ils mèneraient le combat jusqu'au bout, et qu'ils n'accepteraient qu'une reddition inconditionnée. Les Trois ont décidé que la France serait invitée à l'occupation de l'Allemagne et qu'elle participerait à la Commission de contrôle. Notons aussi que la délimitation de la zone française sera décidée par le Comité consultatif européen auquel nous siégeons et sommes représentés par notre ambassadeur à Londres M. Massigli.